Maîtriser sa dette technique : une priorité pour maximiser le ROI

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Les organisations matures consacrent en moyenne 30 % de leurs budgets informatiques au remboursement de la dette technique[1], alors que ces ressources pourraient être investies dans des initiatives créatrices de valeur pour améliorer la compétitivité de l'entreprise. Mais la pression exercée sur les équipes informatiques, pour produire plus vite et raccourcir les délais de mise en production, conduit souvent à des raccourcis opérationnels, compromettant la sécurité des systèmes et créant de la dette technique. À l'instar de la dette financière, la dette technique génère des intérêts, qui peuvent rapidement devenir incontrôlables s'ils ne sont pas gérés correctement.

ROI et dette technique
Maîtriser sa dette technique : une priorité pour maximiser le ROI
Sommaire

Qu'est-ce que la « dette technique » ?

La dette technique est un terme utilisé dans le développement logiciel pour décrire le coût implicite du travail supplémentaire causé par le choix d'une solution facile (ou rapide) à court terme, au lieu d'utiliser une solution plus adaptée mais plus longue. Le terme a été popularisé par Ward Cunningham pour expliquer les conséquences d'une architecture logicielle médiocre ou de mauvaises pratiques de développement logiciel.

Comme la dette financière, la dette technique s'accumule, ce qui signifie que moins elle est traitée, plus elle devient problématique et coûteuse à corriger. Cette dette peut découler de divers facteurs, notamment :

  • Des implémentations précipitées ou incomplètes,
  • Un manque de documentation,
  • Des tests insuffisants,
  • Une technologie obsolète,
  • Des limitations de scalabilité,
  • La non-conformité aux standards de codage.

La dette technique n'est pas intrinsèquement mauvaise, et elle peut être un outil stratégique pour accélérer la mise à jour d'éléments importants. Cependant, si elle n'est pas gérée correctement, elle peut conduire à la dégradation du code, à une augmentation des coûts de maintenance, à une flexibilité réduite et à des cycles de développement futurs plus lents. Traiter la dette technique est essentiel pour maintenir la santé et l'efficacité des processus de développement logiciel et assurer le succès à long terme des projets.

Adopter une gestion proactive de sa dette technique

Réduire sa dette technique devrait être une priorité urgente des entreprises. Une base de code alourdie par la dette technique devient de plus en plus difficile à maintenir et à mettre à jour, entravant la capacité à implémenter efficacement de nouvelles fonctionnalités ou des changements. Cela peut entraîner une dégradation des performances et des problèmes de fiabilité, tels que des bugs ou des pannes du système, affectant la stabilité globale du logiciel.

De plus, une dette technique non gérée peut entraver la scalabilité, rendant difficile l'adaptation de l'architecture et de l'infrastructure pour soutenir la croissance future. Elle pose également des risques de sécurité, car le code ancien ou mal entretenu peut contenir des vulnérabilités. En traitant la dette technique, les organisations peuvent atténuer ces risques et garantir la conformité aux normes de sécurité actuelles. De plus, des niveaux élevés de dette technique peuvent frustrer les équipes de développement, ralentissant leur travail et impactant le moral. Réduire cette dette améliore la productivité des équipes et favorise un environnement de travail positif.

Sur un marché concurrentiel, la capacité à s'adapter rapidement aux nouvelles tendances et technologies est vitale. La gestion de la dette technique améliore l'agilité d'une organisation, lui permettant d'innover et de réagir plus rapidement aux changements du marché. En fin de compte, la gestion proactive de la dette technique maximise le retour sur investissement en prolongeant la durée de vie du logiciel, en réduisant les coûts à long terme et en maintenant un avantage concurrentiel. Par conséquent, traiter la dette technique est essentiel pour assurer la santé, la performance et la compétitivité à long terme des systèmes logiciels.

Stratégies pour traiter la dette technique

Traiter la dette technique nécessite une approche multifacette qui intègre les meilleures pratiques et des processus disciplinés dans le cycle de vie du développement logiciel. Les stratégies clés incluent le refactoring régulier, les revues de code rigoureuses, les tests automatisés et une documentation complète, chacun jouant un rôle essentiel dans la gestion et la réduction de la dette technique :

Remanier son code régulièrement (code refactoring)

Cela permet d'améliorer de façon continue la base de code pour en réduire la complexité et en améliorer la maintenabilité à long terme.

Le refactoring implique la restructuration du code existant sans en modifier le comportement externe. Ce processus est essentiel pour améliorer la qualité du code, en augmenter la lisibilité et éliminer les inefficacités. En effectuant régulièrement du refactoring, les équipes de développement peuvent éliminer systématiquement le code obsolète, simplifier les structures complexes et optimiser les performances. Cette maintenance continue aide à prévenir l'accumulation de la dette technique et assure que la base de code reste propre et efficace, facilitant ainsi l'implémentation de futures améliorations.

Mener des audits approfondis de son code

Mettre en œuvre des évaluations régulières et rigoureuses de son code permet d'en garantir la qualité et la sécurité, prévenant ainsi l'accumulation de dette.

Les revues de code sont une pratique essentielle pour assurer la qualité du code, à travers laquelle les membres de l'équipe examinent systématiquement le code les uns des autres. Ce processus permet d'identifier et de rectifier les problèmes au plus tôt, y compris les bugs potentiels, les mauvaises pratiques de code et les défauts d'architecture qui pourraient contribuer à la dette technique. Des revues de code rigoureuses favorisent le partage des connaissances et la conformité aux standards et best practices de codage. Elles offrent également une opportunité de mentorat et de développement professionnel, améliorant le niveau de compétence global de l'équipe.

Mettre en place des tests automatisés

Il s'agit d'intégrer des tests automatisés à son process de développement pour s'assurer que les modifications et corrections de code n'introduisent pas de nouveaux problèmes, préservant ainsi l'intégrité du système.

La mise en œuvre de tests automatisés est essentielle pour maintenir une base de code de haute qualité et réduire la dette technique. Les tests automatisés, y compris les tests unitaires, les tests d'intégration et les tests de bout en bout, garantissent que les modifications apportées au code n'introduisent pas de nouveaux bugs ni ne cassent les fonctionnalités existantes. En exécutant ces tests en continu, les équipes de développement peuvent détecter et résoudre rapidement les problèmes, ce qui conduit à un logiciel plus stable et fiable. Les tests automatisés facilitent également le refactoring en ajoutant une sécurité qui confirme l'intégrité du code après les modifications.

Bien documenter ses process

Maintenir une documentation complète facilite la maintenance future de ses systèmes informatiques, et permet de transmettre la connaissance et de réduire la courbe d'apprentissage des nouveaux membres de l'équipe.

Cette étape est souvent négligée, mais elle est cruciale dans la gestion de la dette technique. Un code bien documenté, incluant des commentaires, des décisions de conception et des guides d'utilisation, apporte clarté et contexte aux développeurs actuels et futurs. Cette documentation aide les équipes à comprendre l'architecture du système, les dépendances et les raisons derrière certaines implémentations, réduisant ainsi la courbe d'apprentissage pour les nouveaux développeurs et facilitant le processus de maintenance et d'extension du logiciel. De plus, une documentation approfondie soutient une meilleure communication et collaboration au sein de l'équipe, empêchant les malentendus qui pourraient mener à de mauvaises décisions et à une augmentation de la dette technique.

La dette technique peut avoir un impact significatif sur la santé financière et les perspectives de croissance d'une entreprise. Des niveaux élevés de dette technique peuvent limiter l'innovation, car les ressources sont détournées vers la maintenance plutôt que vers le développement de nouveaux produits. De plus, une dette technique non maîtrisée augmente le risque de défaillances des systèmes et de vulnérabilités de sécurité, induisant une augmentation des coûts opérationnels. Ces éléments peuvent nuire à la compétitivité et à la valorisation d'une entreprise.

L'impact de l'IA sur la dette technique

Pour les entreprises qui n'ont pas une bonne maîtrise de leur dette technique, l'intelligence artificielle (IA) risque fortement d'empirer les choses, et cela de deux manières.

Intégration logicielle

L'IA est de plus en plus intégrée dans tous les logiciels et applications, ce qui ajoute une couche de complexité à la maîtrise de la dette technique et renforce le besoin d'efforts continus en matière de mises à jour et d'intégration.

Le rythme rapide du développement de l'IA introduit de nouveaux algorithmes, modèles et frameworks qui peuvent rapidement devenir obsolètes, nécessitant une mise à jour et une optimisation constantes des systèmes logiciels. Cette évolution continue peut mettre à rude épreuve les architectures existantes et exiger un refactoring significatif pour maintenir la compatibilité et les performances. De plus, l'intégration de l'IA dans des systèmes hérités révèle souvent des dettes techniques sous-jacentes, car les anciens systèmes peuvent ne pas être équipés pour gérer les exigences de calcul ou les besoins de traitement des données des technologies modernes de l'IA. En conséquence, les entreprises doivent non seulement traiter la dette technique existante, mais aussi anticiper les défis futurs liés à l'intégration de solutions d'IA de pointe.

Mises à niveau du hardware

L'avènement de processeurs intégrant des unités de calcul dédiées à l'IA exige des mises à jour fréquentes de l'infrastructure IT, contribuant à la dette technique liée au matériel.

Ces processeurs spécialisés, conçus pour optimiser les charges de travail en apprentissage machine et en IA, nécessitent souvent un investissement significatif dans du nouveau matériel et peuvent entraîner des problèmes de compatibilité avec les systèmes existants. À mesure que les algorithmes et modèles d'IA deviennent plus complexes, ils exigent également un matériel plus puissant et plus efficace, poussant les organisations à mettre à jour en permanence leur infrastructure. Ce cycle constant de mises à jour matérielles peut rapidement accumuler de la dette technique s'il n'est pas géré correctement, chaque nouvelle mise à niveau pouvant nécessiter des modifications des systèmes logiciels, des pipelines de données et des flux de travail opérationnels.

L'intégration de l'IA dans les logiciels et le matériel rajoute donc une couche de complexité. À mesure que les capacités de l'IA progressent, les entreprises doivent investir pour s'assurer que leurs systèmes existants sont mis à niveaux et que les nouveaux développements sont intégrés de façon fluide aux systèmes en place. Cela nécessite une approche stratégique de la gestion de la dette technique, pour garantir que les bénéfices apportés par l'IA ne sont pas effacés par une dégradation du passif technique existant.

Des mesures proactives telles que l’adoption d'architectures scalables, l'investissement dans la formation et le développement continus des équipes, et le maintien d'une documentation solide peuvent aider à atténuer les risques associés à l'adoption rapide de l'IA. En abordant la dette technique en parallèle avec l'intégration de l'IA, les organisations peuvent exploiter pleinement le potentiel des technologies d'IA tout en maintenant une base technologique stable et efficace.

Conclusion

Pour les professionnels du Private Equity, il est fondamental de comprendre les rouages de la dette technique. Investir dans des entreprises qui maîtrisent leur dette technique garantira une meilleure rentabilité, car ces entreprises sont mieux positionnées pour innover et maintenir leurs avantages concurrentiels. À l'ère de l'IA, cette gestion proactive devient encore plus critique. Se préoccuper de la dette technique n'est pas seulement une question technique ; c'est un impératif stratégique qui peut avoir un impact significatif sur les résultats financiers et le succès à long terme d'une entreprise.

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Sources

¹McKinsey Digital, April 2023, https://www.mckinsey.com/capabilities/mckinsey-digital/our-insights/breaking-technical-debts-vicious-cycle-to-modernize-your-business

²Agile Alliance, May 2016, “Introduction to the Technical Debt Concept” https://www.agilealliance.org/wpcontent/uploads/2016/05/IntroductiontotheTechnicalDebtConcept-V-02.pdf

Philippe Thomas CEO Vaultinum
Philippe ThomasPhilippe est le CEO de Vaultinum. Expert en nouvelles technologies et haute finance, il a plus de 20 ans d'expérience internationale dans la Fintech.

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